jeudi 5 septembre 2013

Rapport moral AG APLI 2013



En préambule de ce rapport moral, j’aurais aimé pouvoir  vous  annoncer que notre stratégie consistant, certes, à contester  et  à dénoncer, mais aussi et surtout  à  systématiquement  proposer des alternatives crédibles. Que cette stratégie, donc, avait  porté ses fruits.

J’aurais aimé pouvoir vous annoncer qu’enfin :
- la régulation était  acquise,
- que les coûts de production étaient effectivement et définitivement pris en considération,
- que les éleveurs s’étaient  regroupés dans une structure unique pour négocier,  faisant par là même, abstraction de leurs diverses sensibilités,
- bref, que notre avenir de producteur laitier s’éclaircissait durablement.

Malheureusement, malgré la légère embellie actuelle du prix du lait, il m’est impossible de tenir un tel discours.
-Parce que les comptabilités de vos fermes vous le rappellent,
-parce que votre voisin a cessé la production  laitière,
- parce que des régions entières perdent leur potentiel de production,
vous savez que nous sommes loin du compte pour pouvoir  être rassurés sur la sécurité, la visibilité, la confiance et la prospérité dont nous avons tant besoin  pour nous même et pour nos territoires
Peut-on dire pour autant qu’il faille être pessimiste ?

Non. Mille fois non.

Si l’APLI n’avait pas existé il y a longtemps que nous serions tous contractualisés, isolés et ignorants, devenant, comme programmé par des penseurs intéressés, de la main  d’œuvre bon marché  nécessaire à leurs profits juteux.
L’APLI c’est la petite graine qui a bien germé et réveillé les consciences.
L’APLI, par ses actions médiatiques, a interpelé aussi bien les consommateurs que les décideurs. Pour preuve notre mouvement est l’objet d’une étude très sérieuse de la part d’étudiants de science po qui posent cette question :  «  quels rôles  les agriculteurs jouent-ils dans l’élaboration des politiques publiques qui les concernent ? » et  justifient l’intérêt de cette étude  « qui aura ( je cite)   entre autre pour objectif de démontrer aux agriculteurs l’importance de leur pouvoir d’influence, non seulement dans les couloirs des ministères, mais également dans la rue grâce au soutien médiatique que leurs actions peuvent susciter.
L’APLI c’est bien  le grain de sable qui empêche la machine infernale de nous écraser.
Si les résultats de notre lutte menée depuis 4 ans ne semblent  pas à la hauteur de toutes nos espérances.

Notre action  aura  cependant permis de  prendre  du temps.

Temps précieux de la réflexion et de l’analyse pour chacun d’entre nous, avant de s’engager individuellement :
-dans la poursuite de l’activité laitière,
-ou de la réorientation de nos exploitations
- voire  de la cessation.

Temps précieux également pour notre association, cette petite graine qui après avoir bien germé doit prendre racine. Il lui faut du temps pour bien asseoir ses orientations. Certains peuvent s’impatienter mais nous , paysans, savons pourtant bien qu’avant la récolte il faut laisser à la plante le temps de croitre et d’arriver à maturité.

Beaucoup d’éleveurs, et moi le premier, avions pensé que l’épreuve de force de la grève du lait serait une guerre  éclair, que nous gagnerions facilement. L’arrêt, sans doute prématuré, de l’action a pu être durement vécu par certains. Mais nous avons  été et sommes toujours confrontés à des difficultés qui nous contraignent plutôt à mener une guerre de tranchées. On ne lâche rien et avançons pas à pas.

Nos principales difficultés, dois je le rappeler sont:

Le manque de moyens d’abord qui nous empêche de mener de front toutes les actions et constructions, nous obligeant à hiérarchiser selon l’actualité, la législation ou les besoins.

Le manque de soutien ensuite.
Nous sommes les seuls à n’avoir qu’un unique objectif, la défense du producteur de lait.
Certains défendent un type d’agriculture au détriment de l’homme, d’autres défendent prioritairement leur structure.
Sur ce sujet précis, s’il est une leçon à tirer c’est bien celle de la stratégie de l’indépendance. Nous ne devons plus nous égarer dans des relations trop consensuelles avec comme seul objectif de fédérer coûte que coûte.
Nous devons définir notre voie et la suivre contre vents et marées, acceptant ceux qui s’y reconnaissent et veulent la rendre plus dynamique, mais écartant  ceux qui s’y greffent pour d’autres fins.

Et, enfin, ne nous voilons pas la face, des difficultés internes.
Se soustraire à la pensée unique reste une règle incontournable de l’APLI.
Elle a d’innombrables avantages dont la possibilité de débats  contradictoires permettant des analyses fines et des solutions adaptées.
Elle implique aussi des différences de positions qui ne peuvent se clarifier que par le vote majoritaire démocratique.

Certains de nos membres, semant le trouble, n’ont pas compris que l’APLI ne dérogerait jamais à cette règle et ont quitté notre conseil d’administration.
C’est regrettable mais il ne pouvait en être autrement.

Malgré toutes ces embûches et ces  handicaps,
L’APLI a  dépensé énormément d’énergie et remporté nombre de batailles :
-    Nous sommes enfin invités , n’en déplaise à Mr Beulin et consorts, aux  réunions de travail ministérielles  sur l’après quotas . Et nous  y sommes écoutés.

-    Avec l’Office du lait, créé faut il le rappeler par l’APLI, nous avons organisé de nombreuses réunions d’information  et permis  la création des FranceMilkboard, Il faut saluer ici l’acharnement de Paul pour la mise en place et l’agrément de ces structures.
        
-     Le projet de lait équitable (une révolution en soi) a déjà bien démarré, le lancement national de FaireFrance sera le 28 septembre à Paris, et là je donnerai un coup de chapeau à Richard, et à son conseil d’administration qui avec ténacité ont porté le projet jusqu’au bout contre vent et marées.
         
-    Nous travaillons également  l’agrément de l’AOP. Après avoir fait reconnaître plusieurs OP FMB

L’APLI  reste  donc bien le coordonnateur entre ces différentes entités,
L’APLI assure le lien avec l’EMB
L’APLI reste prête à tout autre type d’action de construction ou de contestation, nationale ou européenne.

Le bilan de l’APLI est donc  largement positif. Comment pourrait-il en être autrement alors que nous partions du néant?
Il reste cependant beaucoup de chemin à parcourir, c’est une lutte contre la montre car le nombre de cessations laitières ne cesse de croître.

Il nous faut assurément analyser posément les avancées et les erreurs  commises, non pour se lamenter mais pour en tirer l’essence d’améliorations possibles.
Compenser le manque de moyens par une re-mobilisation des troupes maintenant que nos arguments, à l’épreuve du temps, montrent toute leur pertinence.

Rester fidèle à nos valeurs de départ.

Sans doute aussi, faut il se rapprocher de ceux qui connaissent les mêmes déboires que nous, j’entends par là les autres filières d’élevage.
Il ne s’agit pas de déclencher une guerre fratricide qui laisserait à penser que l’on veut déshabiller Pierre pour habiller Paul. Mais, nul ne peut le nier, le monde animal n’a pas les mêmes problèmes que le monde végétal.

Mais, en récusant le poids des normes et en défendant ensemble, tous éleveurs réunis, les leviers qui nous paraissent évidents: les coûts de production, la rémunération du travail et du capital, la gestion des volumes, nous pourrions  jouer un rôle d’autant plus important tant au niveau des décideurs que des consommateurs.

L’APLI existe et continuera d’exister

2 commentaires:

  1. Nous avons mis ce magnifique rapport moral en ligne afin qu'il puisse être, analysé, discuté et nourrisse la réflexion de chacun

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  2. Il me tarde de connaître le contenu du rapport sur le prix du lait commandé par l'EMB et l'APLI!

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